En irait-il de la forme comme du grand amour que chantait Claude François ? J’ai connu des fortunes diverses lors de mes dernières courses : Jogging de la Principauté à Chimay, Mémorial Guy Toussaint à Gembloux et Jogging de Blanmont. Retour sur les quinze derniers jours, durant lesquels se sont enchaînées des sensations contrastées.
Samedi 18 avril : Jogging de la Principauté à Chimay
Une épreuve du Delhalle retenue par le GaG pour son challenge interne. Je m’aligne avec quelques « ambitions » : devancer les seniors hommes (la catégorie des moins de 40 ans) du club pour marquer des points au challenge et me tester sur un parcours qui me convient mieux que les Crêtes de Spa. Pourtant, j’enchaîne les erreurs et finis en totale déroute.
Je zappe l’échauffement, j’ai déjà trop chaud. Alors qu’il ne fait que 15°C.
Je pars entouré de « visages familiers », des coureurs de mon niveau. Pourtant, j’ai l’impression d’être à bloc dès le passage dans la cour du Château de Chimay, après un kilomètre à peine. Je grille alors de précieuses cartouches en voulant soutenir le rythme, plutôt que de profiter du début de la course pour m’échauffer …
Cinquième kilomètre, premier ravito, les choses se gâtent. Je suis lâché du groupe auquel je m’accrochais depuis le départ. Deux, trois gars de mon club me rattrapent, me dépassent et, à chaque fois, j’échoue à prendre leur foulée. Inquiétude. Dans ma tête : « là, il y a quelque chose qui ne va pas ».
Neuvième kilomètre, plus longue côte de l’épreuve et je me sens ralentir inexorablement. Je suis complètement démobilisé, en roue libre. Je ne prête guère attention au passage folklorique dans un café, ni au ravitaillement à la Chimay. On dit le parcours magnifique, mais je n’en profite pas. Sur une épreuve plus longue, j’aurais pu abandonner.

Je n’avais pas tant le sourire lorsque j’ai traversé le café – crédit photo L’Avenir
Les derniers kilomètres me semblent interminables. Je peine à dépasser les 10 km/h. Un équipier du GaG me rattrape. « Ça va Jean ? » Non. « Moi non plus. » Jean me propose de terminer la course ensemble, ce qui me met un peu de baume au cœur.
Je boucle les 14,3 km en 1:15:06, 356ème sur 1046 classés. Les chiffres ne sont pas dramatiques. J’ai même fini juste devant Sébastien Mahia, vainqueur en titre du Delhalle qui, on s’en doute, n’était pas là pour la compétition. Pourtant je suis loin d’être satisfait. Je n’ai le souvenir que de deux fins de course si difficiles : aux 10 Miles de Louvain-la-Neuve 2014 d’abord, où je me relevais d’une grippe ; puis aux 20 km de Velaines la même année, une course champêtre sur de mauvais chemins inégaux et balayés par le vent, où j’avais là aussi terminé à la dérive. C’était pile un an avant Chimay : je me demande si l’allergie aux pollens (bouleau) n’a pas joué un rôle.
Heureusement, une après-course sympa avec les membres du GaG « rattrape le coup ». C’est ça aussi, le plaisir de courir en club.
Je relativise, fais le bilan et veux tirer des enseignements de ce « jour sans ». Sur le plan mental, je dois apprendre à limiter la casse, ne pas céder à l’inquiétude ou au découragement quand l’un ou l’autre me dépasse à une allure que je ne peux soutenir. J’ai ce jour-là l’impression d’avoir ralenti, ralenti, comme si j’attendais que le prochain me dépasse … À l’autopsie (activité chargée sur Strava), je n’étais pourtant pas si lent que ce que j’imaginais. C’était dur aussi pour ceux devant et en « mordant sur ma chique », même avec de moins bonnes jambes, j’aurais sans doute pu ne leur concéder que 2 ou 3 minutes. Sur le plan physique, il faut surveiller mon alimentation, surtout les quantités. J’ai tout de même pris 2 kg au cours des dernières semaines. Et certainement pas du muscle …
Lundi 20 avril : rencontre avec Scott Jurek
« Rencontre », entre guillemets. Je repère en librairie la traduction française de Eat & Run, l’autobiographie de Scott Jurek. Héro de Born to Run, Scott Jurek est aussi un des meilleurs coureurs d’ultra américains de sa génération. À son palmarès, plusieurs victoires et des records sur le Spartathlon (245 km), le Badwater Ultramarathon (217 km) ou la Western States 100 (161 km).

La traduction française de Eat & Run est publiée aux éditions Guérin (Chamonix)
Sur de si longues distances, même les champions connaissent des coups de mou. Au rythme d’une course par chapitre, Jurek souffre, vomit, mais finit souvent par l’emporter. Le mental, nous en parlions. La vérité d’un Mile n’est pas celle du suivant. J’en prends de la graine.
Dans le livre, pas mal de recettes. Scott Jurek a tourné le dos à la viande, au poisson ou aux produits laitiers. Il est végétalien. Pas vraiment par conviction, mais plutôt parce que c’est ce régime qui lui permet de récupérer le mieux et courir le plus vite. Je parlais de surveiller mon alimentation. Haricots, lentilles, pois chiches : je m’aperçois que mes armoires regorgent de sources de protéines de haute valeur nutritive. Je n’ai jamais été attiré par le mode de vie végé mais là je me dis : pourquoi ne pas essayer, au moins jusqu’aux 20 kilomètres de Bruxelles.
Samedi 25 avril : un semi à la mer
Week-end en famille à la côte belge. Je décide de courir ma séance longue sur le littoral : (20’ à 10km/h – 30’ à 13,5km/h)x2 + 10’. Parti de La Panne, je suis à Westende à la fin de mon entraînement. Plus qu’à sauter dans le prochain tram pour rentrer au point de départ.
J’ai couru, au passage et presque sans m’en rendre compte, mon meilleur semi-marathon. Je n’en ai pas couru beaucoup, à vrai dire : celui de Bruxelles (j’étais encore un débutant) et deux trails. C’était en tous cas le plus facile, alors que j’étais pratiquement à jeun. La confiance revient.
Mercredi 29 avril : Jogging Guy Toussaint
Une ambiance joyeusement bordélique règne dans la cour de l’abbaye de Gembloux. Ce sont les étudiants des Facultés agronomiques qui organisent la course en mémoire d’un des leurs, décédé en 1985 durant un cortège étudiant.
Le parcours à travers la campagne gembloutoise, reconnu lundi à la faveur du balisage déjà en place, est agréable. Des chemins d’entraînement familiers pour les coureurs du GaG, qui ont répondu en nombre à l’appel.

Beaucoup de coureurs du GaG au départ – crédit photo : GaG
Onze kilomètres courus en 50 minutes. Trentième position, sur environ 200 coureurs. Cette fois-ci, je n’ai pas flanché. J’ai pensé à Scott Jurek quand mon esprit a voulu me commander de ralentir. J’ai bien mérité les quelques bières de l’Abbaye de Gembloux après la course. Et le dürüm kefta sauce maison. Tant pis pour l’entorse à mon nouveau régime végétalien 🙂
Vendredi 1er mai : Jogging de Blanmont
Oui, j’enchaîne, mais j’en avais l’envie. Le joli village de Blanmont accueille la 3ème édition de son jogging, une course bien organisée avec un site de départ et une signalisation impeccables. En contrepartie, les organisateurs vous délestent de 9 euros à l’inscription. Bon, on n’a rien pour rien …
Deux distances sont proposées, je décide de m’aligner sur le 6.9 kilomètres. Plat et peu technique (hormis les pavés), le parcours devrait me convenir.
Départ rapide. Les coureurs des deux distances se séparent au 3ème kilomètre. Dans une longue ligne droite à travers champs, je fais le compte : 4 concurrents me séparent de l’homme de tête, au loin, accompagné du vélo qui ouvre la course. Je garde ce petit groupe en ligne de mire, sans trop me soucier de l’arrière : les signaleurs laissent passer les voitures après mon passage.
Cinquième kilomètre, un des coureurs qui me devançaient vient de craquer. Un concurrent éliminé. Un peu plus loin, je recolle aux basques du quatrième à la faveur d’une courte descente assez raide. Le tracé s’élève ensuite en pente douce jusqu’à l’arrivée. Je remonte un puis deux coureurs. Je sprinte sans me retourner. Ça y est, le podium est à moi ! Toujours une fierté, même sur une « petite course ». Sept kilomètres courus en 30 minutes, 3ème sur 176 coureurs classés.
Dire qu’il y a moins de 2 semaines je me croyais hors de forme, fini … Bon, j’exagère à peine. La confiance est maintenant de retour. Demain rendez-vous à Nivelles pour un test sur piste qui permettra à Marc D’Herde d’établir la suite de mon programme. Avant ça, une bonne nuit !
Jonathan Quique ©RunningGeek.be 2015
Une réflexion sur “Ça s’en va et ça revient”